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De la cervoise à la bière
La bière est un breuvage très ancien, il est même quasi certain que ce soit l’une des premières boissons alcoolisées produites par l’Homme, bien avant le vin.
Fabriquée à partir de farine de céréales laissées à fermenter dans de l’eau, la bière entretient un lien fort avec l’exploitation des terres agricoles.
En effet, les archéologues font remonter son élaboration au Néolithique, à peu près simultanément à l’apparition de l’agriculture. On trouve des traces de production et de consommation de bière dans les civilisations du bassin mésopotamien et d’Égypte, vieilles de plusieurs milliers d’années.

En France la cervoise, ancêtre direct de la bière, est largement produite et consommée dès le temps des Gaulois.
La conquête romaine détrône la cervoise au profit du vin, en couvrant de vigne les espaces les plus méridionaux de la Gaule, plus tard lors de la christianisation la bière est reléguée au rang de boisson païenne.
Néanmoins au début du VIIème siècle, le Roi Dagobert I créa le premier monastère pour fabriquer la cervoise. La bière des moines était créée ! Liant ainsi fortement l’image de la bière aux monastères, lien qui reste encore fort aujourd’hui avec les bières d’abbayes que l’on peut trouver en supermarché comme la Chimay ou bien chez votre caviste préféré. Par la suite, sous le règne de Charlemagne, une grande promotion de la bière a été entreprise au travers de corporations et crée une charte régissant le processus de fabrication de la bière au travers de 4 grands axes :
- L’art du brassage est confié aux moines.
- Un corps d’inspecteurs itinérants, chargés de parcourir le royaume afin de veiller à sa qualité, est mis en place
- Des moulins pour le concassage du malt voient le jour
- Le Roi exige que chaque abbaye soit équipée d’une brasserie
De plus, traditionnellement et particulièrement dans le Nord de l’Europe les moines, paysans et artisans produisaient des bières pour réconforter pèlerins, voyageurs qui venaient se restaurer dans les abbayes, de là en découlent les termes bières triples, doubles et saisons.
En 1070, on découvre l’utilité du houblon qui permet une meilleure conservation du breuvage et permet d’apporter une de ses caractéristiques fondamentales : son amertume.
C’est au cours du XIIIème siècle que le métier de brasseur commence à se développer hors des monastères. Les brasseurs s’organisent alors en corporations appelées « guildes ». Saint Louis organisa ces corporations. De plus, il mit en place la première réglementation sur les grains stipulant qu’en cas de famine l’activité de brassage pouvait être interdite.
C’est en 1489 qu’apparaît l’appellation « Bière » dans le statut des brasseurs de Paris. Peu après, une ordonnance royale de 1495 recommande aux brasseurs de faire « de bonnes et loyales cervoises et bières sans y mettre que graine, eau et houblon ».
Bientôt le terme « cervoise » disparaît du langage courant pour devenir, à partir du XVIIème siècle, archaïque et folklorique.


Lexique :
Cervoise : La cervoise est l'ancêtre de la bière. Rarement houblonnée, elle est obtenue à partir de la fermentation d'orge ou d’autres céréales.
Bière triple : Bière à fermentation haute c’est-à-dire fermentée aux alentours de 20 degrés réalisée par les moines avec plus de malt que la bière simple et double, résultant sur une bière dense et alcoolisée aux alentours de 9°. Cette bière était réservée aux convives de marque.
Bière double : Bière à fermentation haute avec plus de malt que la bière simple mais moins que la bière triple, pour un résultat plus dense et plus alcoolisé (autour de 7°).
Nota bene : Les dénominations « simple », « double », « triple », « quadruple » ne veulent en aucun cas désigner le nombre de fermentation.
Bière saison : Les exploitations agricoles belges employaient chaque année des saisonniers qui venaient travailler durant le printemps et l’été pour aider aux récoltes. C’est à l’image d’ailleurs des saisonniers s’occupant des vendanges dans le vin. En plus de fournir le gîte et le couvert, les fermes fournissaient également la bière ! Ces fermes se sont donc mises à brasser une bière l’hiver qui était ensuite mise en garde jusqu’à l’arrivée des travailleurs saisonniers. D’où le nom de saison.
